Une partie de notre activité consiste à pratiquer et socialiser des outils contributifs, dans l’optique de favoriser les mouvements du logiciel libre et gratuit, ainsi que celui des « communs ». Ceux-cis se rejoignent dans un modèle « pair-à-pair » d’autorité et de travail collectif, ce qui rejoint les valeurs chères à notre association de partage et de diversification des savoirs.
Ce site s’articule ainsi à tout un milieu technique, le plus souverain possible et en marges des « solutions » des GAFAM, qui comprend : notre propre espace de serveur (VPS), hébergé en Europe ; un environnement « Framaspace » de travail collaboratif basé sur Nextcloud et fourni par Framasoft ; le logiciel d’écriture collaborative de textes Etherpad ; le plugin d’annotation sociale de textes Hypothes.is ; notre blog Mediapart ; l’instance Peertube de la MSH Paris Nord pour nos archives audiovisuelles et leurs annotations (via l’application Celluloid) ; un forum interne de discussion Mattermost ; l’outil libre de visioconférence Jitsi ; …
Ce site, généreusement développé par Riwad Salim à partir d’un modèle Jekyll et de l’identité visuelle d’Épokhè, se sert du système de gestion de contenu (CMS) Decap afin de distribuer la possibilité, pour les membres actifs·ves d’Épokhè, d’ajouter de nouvelles entrées aux pages « projets » et « ressources ». Construit de manière collaborative et bénévole, ce site vise à répondre à ces mêmes valeurs et modes de fonctionnement de l’association, ainsi qu’à servir de mi-lieu entre ses groupes de travail, les membres/amis d’Épokhè et un réseau plus large de visiteurs·euses.
Notre identité visuelle, travaillée par la typographe et graphiste Laurette Comlard, tourne autour du logo du « pilcrow » : le même symbole qui figure sur les logiciels de traitement de texte numériques. Ce signe était d’abord utilisé au Moyen-Âge, dans des manuscrits, pour marquer un changement d’idée sans sauter de ligne, afin d’économiser du papier. Ce symbole évoque ainsi à la fois l’évolution des techniques et technologies d’écriture et l’idée de bifurcation, comme « retour à la ligne » nécessitant une suspension (épokhè).
Généralement utilisé comme caractère masqué par nos ordinateurs, ce symbole a traversé les époques pour représenter l’espace vide et sans contenu : une « absence de signal », dont nos automates computationnels ne peuvent toutefois se dispenser. Le pilcrow, en faisant signe vers cet entre-deux épokhal, sans jugement ni instruction a priori, permet de manifester symboliquement le (mi)lieu de la pensée et de l’interprétation humaine, dans toute son ambigüité (son « trouble ») et sa part d’incalculabilité (son indétermination). Il représente en outre l’association de cette « valeur esprit » avec le milieu technique du numérique, que la déséconomie de l’attention généralisée tend de nos jours à dissocier.
Plus largement, le pilcrow s’apparente à une colonne de l’antiquité, ce qui évoque l’origine de la philosophie et de la démocratie en Grèce et constitue ainsi un hommage au philosophe Bernard Stiegler et aux travaux de sa fille, Barbara Stiegler, qui n’ont eu de cesse de mobiliser ces histoires pour notre époque. Le pilcrow sous sa forme étendue à la verticale, comme sur ce site, évoque en outre l’importance de la capacité de discernement, dans notre ère, caractérisée aussi bien par la structure hypertextuelle et horizontale du web que par un hyper-relativisme postmoderne, consistant à dire ou laisser penser que tout se vaut.